Rachel, par Eliane Biedermann
26 avril 2010
Rachel, Regain, traduit de l’hébreu par Bernard Grasset. Paris : Arfuyen, 2006.
Rachel Blaustein (1890-1931) est une des grandes femmes poètes de la littérature hébraïque moderne. Née en Russie dans une famille juive croyante et baignée de culture (sa mère connaissait Tolstoï), elle se consacre d’abord à la peinture. En 1909, elle part travailler la terre en Israël, et fait un séjour à Toulouse où elle suit des cours d’agronomie avant de s’installer en 1919 dans un kibboutz près du lac de Tibériade ; La tuberculose à l’origine de sa mort précoce la voue à la solitude à cause des risques de contagion.
L’émission de Victor Malka : « Maison d’études »diffusée sur France Culture le 13 août 2006 lui a été consacrée. Bernard Grasset , poète et traducteur a été invité pour parler de Regain et rendre hommage à cette grande poète qui a appris l’hébreu pour écrire dans cette langue. Ainsi que Bernard Grasset le souligne, la poésie de Rachel, nourrie de culture biblique, est proche de la prière mais contemporaine par le style. Témoin de l’effacement et de l’éphémère, Rachel célèbre le rythme de la nature, la patience des saisons et exprime son aspiration à l’infini : « Ma source est abandonnée dans les profondeurs de la terre, / Mais ses eaux, il les a détournées, / et de soif sans fin j’expire. »
On ne peut rester insensible au lyrisme de Rachel qui a connu le destin tragique d’une Emily Brontë, et au chant mélancolique d’une femme souffrante qui exprime son amour pour les autres, pour la beauté d’une langue et pour la Terre Sainte de ses origines : « Je ne t’ai pas chanté, mon pays, / Et je n’ai pas glorifié ton nom / Par de victorieux exploits, / Par les prises de guerre. / Rien qu’un arbre -–mes mains ont planté : / Aux bords paisibles du Jourdain, / Rien qu’une pente – mes pieds ont foulé / A travers la campagne. »
(recension parue dans la revue « Interventions à Haute Voix » n° 39, février 2007)