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Jean-Pierre Bars, poèmes

22 septembre 2014

par Jean-Pierre Bars

Aller

Aller à l’eau qui me pénètre de son âme déliée
à son écoulement autant qu’à sa durée
à sa présence dans l’espace sans frontière
Aller à la lumière qui enfante les reflets
et l’en-dessus et l’en-dessous de nos mouvantes destinées.

Aller aux eaux qui plongent au plus profond de l’ombre
pour y trouver l’œil et le cœur du monde.

Aller à la terre les mains grand-ouvert
et la prendre à mourir comme on fauche le blé.

Aller aller toujours traverser les saisons
qui nous prêtent l’haleine incomparable
des semailles que furent nos défaites
des victoires que seront nos moissons.

*

Le matin est si clair
après des jours de pluie
si frais dans la lumière
d’un dimanche sans plis.
L’aubépine est couverte
de perles de rosée
J’attends, je la regarde
j’attends sa nouveauté.
L’autre devant la maison
en grappes rouges sombres
je l’attends elle aussi
aux lisières du monde.
Parfois je voudrais être
rien de plus qu’une image
un livre qu’on feuillette
et qui part en voyage

*

Si dans la plaine sans écho
tu n’entends pas trembler le vent
marche aux lumières du silence
va à la nuit et sois le feu
des sources sous les mots
de passage et de peu.
Sois pour toi-même la sonde
l’abime et la marée profonde
sache souffler sur la cendre
des étoiles qui furent
en toi l’étable de décembre.

*

à Jean Cayrol

Comme il est difficile
et pourtant si tenace
le désir indistinct
le désir permanent
de dire avec des mots
ce que les mots ne peuvent
de prendre avec les mains
ce qui est dans le cœur.

Nous ne porterons pas
la lumière à nos bouches
nous n’avons pas le droit
d’y tremper nos malheurs
si faibles sont nos cœurs
au bord nu de la mort
Si pauvres quand les touchent
le visage et les mains
d’un indicible amour
d’un indicible qui passe
entre les arbres
et va sur les chemins
qui dessinent les feuilles
au clair de nos printemps,
qui regarde et qui pleure
sur le sable infini
que disperse le vent
pour que le ciel en nous
jamais ne meure.

*

Où donc es-tu, ami de l’homme
qui pleura tant sous l’établi
la détresse du temps
avec des mots et des images
plus simple que le jour
quand il attend
que passent les nuages
que pousse un peu le vent ;
quand il attend que se dégage
à l’horizon le bleu le clair
que les yeux d’un enfant
peuvent épanouir
comme une ville à jamais
dans les fleurs de la nuit
et dans l’âme abondante
de celui qui sauva
la terre de son poids
les étoiles du froid
la braise des ravages
de Haine et de Folie.

*

La grande nuit te prit comme un enfant
et t’emmena plus loin
que n’auraient jamais pu les vents.
Faisait défaut la sainte confiance
dans les jeux de la lumière mais
un amour sans voile et sans mesure te portait

Ils sont comme les océans
certains profonds, certains reflets
certains soleil ou bien le vent.

Ils ont la courbe de la vague
la mollesse des rivages
quand dans l’écume qui s’enivre

la peau ultime de clarté
enfonce dans le sable humide
la part de leur éternité ;

Ils ont le ciel pour mère et pour compagne
sur la prairie fleurit le sel
la lune danse là et le soleil
compte les âmes de son mieux.

Ce sont des langues éphémères,
au loin portées par les embruns,
plus vives que les yeux de la lumière
quand elle abreuve les cœurs de bonté.


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