Editorial
22 septembre 2014
Notre numéro de rentrée s’ouvre sur une réflexion à propos des saisons, où il sera question de divers auteurs, et notamment de John Ruskin, puisque sa notion d’ « illusion pathétique » nous paraît intéressante à discuter sur ce thème.
Nous accueillons ou retrouvons un certain nombre de poètes et d’écrivains. Jean Migrenne nous offre une traduction de Britannia de Daniel Defoe.
Nous avons interrogé Jean-Baptiste Colcher sur son œuvre de graveur et de peintre, à l’occasion du salon de gravure de Souppes-sur-Loing.
Bonne rentrée,
bonne lecture.
Retrouvons-nous au Salon de la Revue, Espace des Blancs-Manteaux les 11 et 12 octobres
Parutions :
Pluie de noix : Petite anthologie bilingue de poésie alsacienne.
Pluie de noix est une image insolite de Claude Vigée qui a lu et médité l’œuvre d’André Weckmann, en particulier le poème « Kochersberg » paru en 1967 dans la
Petite anthologie de la poésie alsacienne. Le poète de Steinbourg y évoque les souffrances et les espoirs d’un peuple en douze strophes écrites en vers libres, dans un souffle
imprimé par le vent de la vie vécue entre les frontières de sa province rurale connue pour sa beauté et sa convivialité autant que pour sa langue rugueuse et douce à la
fois, si peu accueillie dans sa singularité. Les poèmes bilingues de cette brève anthologie, parfois traduits en français par les poètes eux-mêmes, constituent un extrait
limité et subjectif d’une littérature alémanique abondante et diversifiée, se déclinant en d’autres genres tels que le théâtre et la chanson. [...]
Heidi Traendlin
Pluie de noix : L’Alsace à Paris.
Lecture bilingue de poésie alsacienne le jeudi 20 novembre 2014 de 18 heures 30 à 20 heures à la librairie L’Œil écoute, 77 bld du Montparnasse - 75006 Paris.
Tél. : 01 45 48 27 62.
Anne Mounic, "What Is It ? - That I Heard." Katherine Mansdield’s Wings of Wonder.
Amsterdam : Rodopi, 2014.
The spirit of the narrative is mankind’s reflexive consciousness, or poetic genius ? our unique access to ourselves, our desperate endeavour “to be REAL”. It brings to light the dark unknown which is the zest of our lives ; it gives shape to the tremor of our inner souls ? otherwise nearly imperceptible. “Ah, what is it ? ? that I heard”, Katherine Mansfield wondered throughout her whole life and writings ? poems and stories, letters and notebooks. Through the metamorphic movement of her highly sensitive, perceptive mind, she highlights the deep ambivalence of light and dark, mirth and awe, fear and longing which is the keen feature of our naked existence. She sketches her epic motifs with a dedicated sense of wonder.
A true poet, she returns, as Baudelaire, Keats, Hopkins, Proust, or Shakespeare, to the origins of language ? this poignant contrast of light and dark following the alternate rhythm of night and day, of yielding to darkness and converting it into speech : “Let there be light.” Poetic language is performative. It means an everlasting questioning over the abyss ? with wings of wonder upon the face of the deep.
This volume will also be of interest to scholars and dedicated readers who wish to share in the current reassessment of Katherine Mansfield’s poetic achievement. Her awareness of the literary tradition and modernity, the utmost finesse of her artistic thought, the boldness of her temper make her a major twentieth-century poet.
Octobre : Le Dit du corbeau, quatre novellas. Paris : Feuilles, 2014.
Pascal écrivait que « les choses sont vraies, ou fausses, selon la face par où on les regarde ». Les quatre nouvelles qui composent ce livre ne cherchent pas à démêler le vrai du faux, mais à éclairer la complexité de la vie ambivalente en l’abordant sous des faces diverses, l’Histoire collective, et ses guerres, ainsi que l’histoire familiale de chacun, et ses guerres. On ressent à la fois, au fil des pages, la façon dont se noue la tragédie dans l’imposition de ses événements, et la manière dont, renouant avec le singulier au sein du récit, elle tente par la parole, dans l’expression poétique ou artistique, de se dénouer. L’œuvre au fil du temps tisse sa demeure, tellement liée à la demeure première (« La demeure et l’infini », seuil éclairant l’ensemble de l’ouvrage en postface), parcourant ses couloirs (« Le Dit du corbeau »), explorant le puits (« L’origine ») sans s’y abandonner, puisque s’effectue le choix (« L’adagio de Tomaso Albinoni »), qui articule le devenir sur l’axe de sa reprise jusqu’à l’exquis (« Chapeau de paille dans la chapelle des Anges »), mot emprunté à Eugène Delacroix qui, dans la chapelle de l’église Saint-Sulpice, peignit la lutte de Jacob avec l’ange, situant l’épisode en forêt de Sénart, du côté de Champrosay, où il avait sa maison. « L’origine », seconde novella, s’inspire de l’histoire de Genie, enfant détenue par ses parents dans le plus complet isolement jusqu’au moment où elle fut découverte, en 1970, ne sachant parler. Chaque novella s’ancre ainsi dans la réalité vive, ou crue, et s’ouvre, par le biais de figures, telle celle du corbeau, ou bien celles que Delacroix peignit dans la chapelle des Anges, à un creusement subjectif visant à en dévoiler toute la substance singulière incarnée. Nous nous portons au-delà du reportage de soi au sein de la vie immédiate pour entrer dans la dimension résonnante de l’expérience humaine, ou l’instant propre du partage. Dans « l’esprit du récit », cette « prise en Compte », ce « Regard » (expressions d’Imre Kertész), s’esquisse au fil de la lecture une utopie toujours ouverte, « tendre utopie du désirable » qui participe du mouvement de l’être en son altérité des profondeurs et du devenir. Ainsi, regarder l’existence sous les facettes diverses du questionnement subjectif revient à en convertir le tragique pour la porter à sa splendeur ‒ habitable ‒ sans torsion de la réalité sous la tyrannie de l’Idée, fût-elle idée du bien. Le poète ou l’artiste considère plutôt les « menus Détails » (expression de William Blake) qu’assemblent mémoire et imagination. Les ailes noires du corbeau, individu à la fois réel et mythique, franchissent la distance de la double altérité qui nous fonde, celle d’autrui et celle du temps. Ce mythe-là, qui permet de pénétrer, sans prétention à l’omniscience, une réalité inconnue, assume la continuité de l’humain et de ce qui, par une transmission tout intuitive, nous fut légué. Cet enseignement muet, tout de sensations charnelles, de perceptions fugaces et de regards, n’affleure que dans la pâte minutieusement travaillée du récit ‒ historié.
Mercredi 15 octobre : Salon des Créateurs d’Estampe aux Invalides.
Invité de l’Atelier GuyAnne : Cédric Neau.